Si la seconde semaine du mois de mai est considérée comme la semaine de tous les périls, la session d’été de la Knesset qui s’est ouverte ce lundi risque bel et bien d’être la session de tous les périls. En effet plusieurs projets de loi qui vont être déposés sur la table des députés seront de nature à provoquer de vives turbulences dans la classe politique en général et dans la coalition gouvernementale en particulier. Il y a d’abord la loi sur le non-enrôlement des élèves de yéchivot qui devrait, à nouveau, faire l’objet d’une confrontation directe entre les formations orthodoxes et le ministre de la Défense Avigdor Lieberman. Il y a également la loi sur la conversion qui, là encore, risque de dresser Lieberman, apôtre de la laïcité au sein du gouvernement, face à un front religieux. Et puis il y a la fameuse deux projets de loi voté en première lecture lundi soir: d’abord la loi permettant au cabinet restreint pour la sécurité nationale de décider de partir en guerre sans avoir l’aval de l’ensemble du gouvernement. Et surtout la loi sur la nationalité qui revient sur le tapis, dans une énième version qui a de fortes chances de tomber ensuite en décrépitude durant cette session. Mais l’un des enjeux majeurs de cette session d’été sera sans aucun doute l’amendement visant à octroyer la priorité au pouvoir législatif sur le pouvoir juridique. Cet amendement a un objectif avoué : réduire les prérogatives de la Cour Suprême qui, selon le gouvernement, s’est trop habituée ces dernières années, à casser, et pour diverses raisons, des lois votées par le Parlement. Même si le conseiller juridique du gouvernement se montre hostile à une telle démarche, Binyamin Nétanyaou, le Likoud, et l’ensemble des partis religieux y sont favorables. Le seul opposant est le ministre des Finances Moché Kahlon qui dispose d’un droit de veto sur des projets de loi qui ne seraient pas de son goût. Si des difficultés devaient surgir dans la procédure de vote de cet amendement, Binyamin Nétanyaou pourrait user de ce pretexte pour provoquer une crise gouvernementale qui aboutisse à des élections anticipées. Car, il ne faut pas se leurrer : sur ces projets de loi, plane l’ombre menaçante des enquêtes judiciaires concernant le Premier ministre. Et la véritable question qui interpelle les élus israéliens sera de savoir si Binyamin Nétanyaou veut consacrer cette session d’été à consolider sa coalition ou bien, s’il préfère faire éclater cette 20e Knesset en perspective de la décision du conseiller juridique du gouvernement Mendelblit concernant son éventuelle inculpation dans les dossiers judiciaires le concernant. La crise politique qu’il a traversée au mois de mars dernier lui a permis de constater qu’aucune formation de la coalition ne souhaitait réellement d’élections anticipées : certainement pas les partis comme Shas et Israël Beiténou qui apparaissent affaiblis dans tous les sondages et risqueraient de perdre des ministères d’influence comme celui de l’Intérieur ou de la Défense (!) en cas de chute du gouvernement. Mais les voies de la politique israélienne sont impénétrables et il existe parfois des dynamiques qui se développent sans la moindre logique et qui finalement conduisent certaines formations à une sorte d’hara-kiri politique incohérent. En rajoutant à cela les défis sécuritaires qui se présentent à Israël avec la vive tension au sud dans la Bande de Gaza et au nord, le long des frontières avec le Liban et la Syrie, on comprend mieux pourquoi cette session d’été risque bien de figurer au palmarès des plus mouvementées de l’histoire politique d’Israël.
Daniel Haïk