Le rav Yonathan Hayoun, nouveau rabbin local, est entré solennellement en fonction le 17 décembre. Les Juifs de cette ville-frontière qui travaillent ou étudient à Genève étaient jusqu’alors, pour l’essentiel, de souche marocaine. Ce n’est plus le cas.
Albert Benchimol préside la communauté d’Annemasse (Haute-Savoie) depuis quatre ans. Ici vivent une centaine de familles juives, pour une population totale de quarante-cinq mille habitants dans la ville et les communes voisines.
Le rav Chmuel Cohen zal a officié dans la synagogue pendant trente-quatre ans. Il dirigeait en outre le centre d’action sociale israélite de Genève. La métropole helvétique est située à quatre kilomètres seulement. Le rabbin est décédé en septembre 2016.
Il a été remplacé au début de l’automne par le rav Yonathan Hayoun. Natif de Metz, ce dernier a notamment étudié à Aix-les-Bains (où il a rencontré son épouse, Aliza) et en Israël.
La cérémonie d’investiture officielle de ce jeune homme très motivé et à peine trentenaire s’est tenue le dimanche 17 décembre, devant cent dix personnes environ, en présence du Grand rabbin de France, Haïm Korsia, et de dirigeants des communautés rhône-alpines, dont le Grand rabbin régional Richard Wertenschlag, venu de Lyon pour l’occasion. Le maire (PS), Christian Dupessey, était là lui aussi. Il a même récité la prière pour la République en compagnie de Haïm Korsia. La députée (LR) de la circonscription, Virginie Duby-Muller, a rappelé le rôle qu’ont joué les montagnards de Haute-Savoie dans le sauvetage des réfugiés juifs qui sont passés par ici sous l’Occupation pour traverser la frontière et échapper aux griffes nazies.
La vie juive, à Annemasse, est intimement liée à celle de la Suisse. S’il y a minyan tous les Chabbats (« et parfois en semaine, précise Albert Benchimol, le dimanche matin ou pour Roch ‘hodech… »), c’est parce que Genève est un aimant inépuisable. On peut travailler ou étudier là-bas sans acquitter les frais exorbitants qu’il est nécessaire d’assumer pour résider dans la Confédération. La solution, c’est d’élire domicile côté français.
Historiquement, le judaïsme local était de souche marocaine. Nombreux sont ceux qui ont franchi la Méditerranée pour trouver un emploi dans le canton de Genève ou s’inscrire à l’école ORT de la même ville. Ils sont désormais retraités et une partie de la jeune génération est montée à Paris, s’est envolée pour Israël ou pour d’autres destinations. Elle a été remplacée par de nouveaux « frontaliers » travaillant en Suisse et débarqués de la capitale ou d’ailleurs dans l’espace francophone. Il y a également des Israéliens inscrits au kollel de Genève.
Une mutation démographique associée à un certain partage des tâches. A Annemasse, on peut prier à la synagogue ou au petit Beth Habad fondé voilà deux ans et on peut faire ses courses dans l’un des deux supermarchés casher de la cité savoyarde. On vient de Suisse et de toute la région pour s’y approvisionner. L’enseignement scolaire est réservé à la communauté de Genève qui dispose de deux établissements. Le premier est géré par l’Alliance israélite universelle (AIU) et le second par le mouvement Loubavitch. La plupart de nos coreligionnaires annemassiens y envoient leurs enfants.
Cela n’empêche pas le rav Hayoun de mûrir une série de projets pédagogiques : davantage de chiourim pour adultes, des cours dispensés en collaboration avec les étudiants du kollel… Son épouse a déjà mis sur pied un Oneg Chabbat pour femmes.
Axel Gantz