« Le grand rabbin Yossef ‘Haïm Sitruk zatsal a été l’une des personnalités qui m’ont le plus marqué »
Le rav Nissim Elmalia’h est, depuis 15 ans, rabbin de l’Office des Aéroports israéliens. Originaire d’une famille marocaine, son grand-père, le rav Mordekhaï Elmalia’h a été le grand rabbin de Kiriat Gat. Après avoir fait sa scolarité dans les institutions ‘Habad d’Israël, il a obtenu une smikha de rav et a été en poste pendant 3 ans à Las Vegas avant d’être nommé en remplacement du rav Yoël Suissa, dont il rend hommage, en tant que rav des Aéroports israéliens. Une fonction qui lui donne l’occasion de rencontrer de grandes sommités religieuses. Alors que l’aéroport Ben Gourion s’apprête à voir transiter des centaines de milliers de passagers autour de Pessa’h, le rav a trouvé le temps de recevoir Haguesher.
– Quelle est votre mission en tant que rav de l’Office des Aéroports israéliens ? Tout d’abord, sachez qu’en même temps que je vous parle, je suis en train de mettre les téfilin à l’un des responsables des Aéroports israéliens qui m’a sollicité. Et cela fait aussi partie de ma fonction. Alors c’est vrai que cela vient aussi de mon orientation ‘Habad mais ce n’est pas tout. Nous avons, en tant que rav des Aéroports israéliens une mission importante : offrir aux millions de passagers qui utilisent chaque année nos aéroports et bien entendu en particulier l’aéroport Ben Gourion de pouvoir disposer de services religieux efficaces et performants. Je pense que bon nombre de vos lecteurs ont pu profiter durant leur passage à l’aéroport des synagogues mises à la disposition des passagers. Il y a bien entendu la synagogue dans l’espace du Duty Free pour les passagers au départ qui ne désemplit pas, en particulier le matin. Ce sont, chaque jour, des centaines de fidèles voire des milliers, qui viennent prier, réciter le kadich, écouter la lecture de la Torah. Nous disposons là d’un espace religieux vaste et fonctionnel. Il faut aussi savoir qu’il y a une synagogue dans le hall d’arrivée au premier étage. Mais nous avons aussi à entretenir des synagogues pour l’ensemble des employés de l’aéroport ainsi qu’une synagogue dans l’ancien Terminal 1. Il faut également savoir, à ce propos, que le ministère de l’Intégration possède sa synagogue ouverte pour les olim arrivant en Israël et je tiens à souligner que ce Bet Knesset a été ouvert à la suite de demandes de olim de France qui, on le sait, sont montés massivement ces dernières années ! Enfin il y a une synagogue dans le terminal « Maman » des cargos qui sert en particulier pour les endeuillés qui acheminent le corps de leur proche en Israël. Au total, nous sommes responsables de 8 synagogues. – Quels sont les besoins des passagers qui vous sollicitent ? -Les questions les plus fréquentes se rapportent à l’heure des offices. Ceux qui voyagent tôt le matin veulent souvent savoir à quelle heure ils peuvent prier. Il est également très fréquent que je favorise et accélère le départ de passagers religieux, à la sortie du Chabbat. Il s’agit de passagers dont les vols décollent samedi soir très vite après la fin de chabbat. Mon intervention leur facilite l’embarquement rapide. Et puis, il y a également de nombreuses questions sur la casherout, en particulier des produits que l’on peut trouver au Duty Free. Et encore de nombreux autres sujets qui concernent les milliers d’employés de l’Office des Aéroports, et qui je vous l’assure, remplissent aisément une journée de travail. Et enfin je dois souligner que l’Office des Aéroports gère actuellement la construction de l’Aéroport Ilan Ramon près d’Eilat qui sera un aéroport international et je dois installer les services religieux
de cet aéroport qui sera ulta-moderne, ce qui actuellement occupe une partie de mon temps. Là encore, nous avons eu des demandes précises de passagers juifs de France qui réclament ces services ! -Avez-vous un souvenir marquant de votre action en tant que rav des Aéroports ? Ecoutez, j’ai bien évidemment de nombreux souvenirs mais je voudrais en souligner un qui m’a toujours marqué: C’est lorsque le grand rabbin Yossef ‘Haïm Sitruk zatsal arrivait en Israël. J’ai souvent eu le privilège de l’accueillir à son arrivée à l’aéroport ou à son départ vers la France et j’avoue qu’il m’a toujours beaucoup impressionné. Et je ne peux m’empêcher de penser à cette triste journée où nous avons reçu sa dépouille mortelle. J’ai eu alors une peine immense. Et j’ai encore, en tant que jeune rav, le souvenir des retours en Israël du grand rabbin de Jérusalem, Rabbi Shalom Messas zatsal qui revenait de Paris et dont la azkara tombe d’ailleurs le 10 Nissan juste avant Pessa’h. Et il y a bien entendu de nombreux autres rabbanim et admourim qui utilisent nos services et que j’ai plaisir à accompagner ou à aider. Je le reconnais : être rav des Aéroports d’Israël offre des opportunités tout à fait hors du commun d’être en contact avec des sommités du monde de la Torah et j’en suis très fier. -Nous sommes à la veille de Pessa’h, quel est pour vous l’un des enseignements majeurs de cette fête. Le Rabbi de Loubavitch nous enseigne au nom du Maharal de Prague à propos du verset qui dit qu’« à chaque génération, nous devons nous considérer comme si nous étions sortis, nous-mêmes, d’Egypte. » Comment pourrions-nous réellement imaginer que nous avons participé à un événement qui s’est tenu il y a plus de 3500 ans ? Le Maharal nous explique qu’en même temps que les Bné Israël sont sortis d’Egypte, ils sont devenus libres mais ils ne sont pas devenus libres uniquement à l’époque de la Sortie d’Egypte. D.ieu a insufflé en nous et pour l’Eternité, le souffle de la Liberté. De telle sorte que même lorsque pendant des millénaires nous avons subi les persécutions de nos ennemis, nous sommes restés pleinement libres. Cette liberté, nous l’avons reçue le soir de la Sortie d’Egypte. Et c’est pourquoi aujourd’hui 3500 ans plus tard, c’est cette liberté qui nous permet de nous considérer comme si nous étions sortis d’Egypte. Elle dresse un lien immuable entre les générations de notre peuple, de la génération du Désert qui a vu tant de miracles, à notre génération qui vit ici sur la Terre d’Israël.- Quel est le souhait que vous formulez à l’adresse de la communauté juive de France et de la communauté francophone en Israël ? – A l’occasion de la fête de Pessa’h je voudrais saisir l’occasion de cet entretien pour souhaiter un Pessa’h Casher et Saméa’h à tous les olim de France, à tous les membres de la grande et belle communauté juive de France. Nous les voyons au départ ou à l’arrivée à l’aéroport Ben Gourion et c’est pour nous une source de joie et d’émotion de voir d’abord tant d’olim venir s’installer en Erets Israël et compris ceux qui voyagent régulièrement pour leur travail en France ou ailleurs, de voir tant de touristes juifs de France qui viennent affirmer ainsi leur amour pour la Terre d’Israël. Nous sommes très fiers de les accueillir et nous espérons qu’au bout du compte tous monterons en Israël.
Propos recueillis par Daniel Haik