Alors qu’Israël fournit de l’aide aux Kurdes dans le nord de la Syrie depuis le retrait américain de la zone, Haguesher s’est penché sur l’histoire des Juifs d’Asie occidentale, vieille de 2500 ans. Cette communauté se revendique comme les descendants des 10 tribus expulsées du Royaume d’Israël, pendant l’exile assyrien.
Le Kurdistan est une région moyenorientale éclatée entre l’Iran, l’Azerbaïdjan, l’Irak, la Syrie et la Turquie. De nombreuses communautés juives de ces territoires affirmaient y demeurer depuis plus de 2500 ans, depuis que les Juifs du nord du royaume d’Israël ont été envoyés en exil dans les régions kurdes d’Iran et d’Asie centrale. La majorité d’entre eux vivait en Irak jusque dans les années 1950.
Une communauté ancestrale
L’ancienne communauté kurde d’Irak puise ses racines dans le premier exil babylonien ; ses membres parlaient l’araméen, la langue du Talmud. Globalement, pendant des générations, les Juifs des zones kurdes ont vécu dans un isolement relatif. Beaucoup travaillaient comme agriculteurs, marchands ambulants ou tisserands. Au 12e siècle, certains Juifs fuyant les violences croisées en Syrie et en Terre d’Israël, ont trouvé refuge parmi les communautés du Kurdistan. A cette époque, plus d’une centaine y résidaient. L’une des plus importantes se trouvait à Amadiya dans l’Irak actuel, où la communauté comptait environ 25 000 personnes. Vers le milieu du 13e siècle, les Juifs irakiens ont à leur tour fui les grands centres juifs tels que Bagdad lorsque les Mongols s’emparèrent du Moyen-Orient. Beaucoup ont ainsi rejoint les communautés juives autochtones des régions kurdes.
Dans l’ensemble, les Juifs kurdes semblaient très attachés à Sion ; pendant des générations, ils aspiraient à retourner sur la terre de leurs ancêtres. Au 16e siècle, les Juifs kurdes ont commencé à s’y installer, notamment dans la ville de Safed, en Haute Galilée. Des milliers d’autres ont émigré en Palestine mandataire dans les années 1920 et 1930.
L’époque moderne
Jusqu’à leur immigration massive et quasi totale vers le nouvel Etat hébreu à la fin des années 1940 et surtout au début des années 1950, les Juifs du Kurdistan (principalement d’Iran, d’Azerbaïdjan, d’Irak) vivaient en tant que groupes ethniques fermés, parlant des dialectes néo-araméens. Sans statistiques précises, on supposait à 20 000 ou 30 000 leur nombre avant 1948. Jusqu’en 1950–51, 146 communautés habitaient en zone irakienne, 9 en zone iranienne, 11 en zone turque et 11 autres réparties entre zone syrienne et azérie. A la création de l’Etat d’Israël, les Juifs du Kurdistan subirent de fortes pressions de la part des autorités de leurs pays respectifs, surtout en Irak. De 1950 à 1952, l’opération « Ezra et Né’hemia », une série de ponts aériens préparée par le gouvernement israélien, permit le rapatriement en Israël de la totalité des Juifs kurdes d’Irak. Ainsi durant ces années, le jeune Etat hébreu est venu à la rescousse des quelque 25 000 Juifs des régions kurdes irakiennes. Pratiquement tous les autres Juifs des terres kurdes ont suivi leurs frères en Israël ; on estime que seule une poignée de Juifs vit encore dans ces contrées.
La vie religieuse
Les communautés avaient pour coutume le mariage à un très jeune âge et la prière sur les tombes des prophètes juifs. Ainsi, les Juifs kurdes vénéraient particulièrement le prophète Na’houm. Chaque année, pendant la fête de Chavouot, ils se rendaient sur sa tombe, à Alqosh en Irak, pour y organiser des célébrations. Au 17e siècle, la fameuse famille Barzani fit construire des yechivot dans tout le Kurdistan. La lignée donna de nombreux rabbins et maîtres d’étude aux Juifs du Kurdistan mais aussi à l’ensemble des Juifs d’Irak jusqu’au 20e siècle. Plus récemment, le rabbin kurde Zecharia Barashi, l’un des fondateurs de l’Association des Juifs kurdes en Israël, rédacteur d’un journal judéo-kurde et membre du Département d’éducation de la ville de Jérusalem, a été connu comme le doyen des Israéliens, mort à 117 ans !
Noémie GryNberG