Gantz prend de la dimension
Le 23 octobre dernier au lendemain des fêtes de Tichri Benny Gantz a écrit une page importante de l’histoire politique de l’Etat d’Israël. A l’exception de Binyamin Nétanyaou, il a été le premier homme politique de la décennie à se voir confier par le président de l’Etat, le mandat en vue de former une coalition gouvernementale. Et c’est en soi un exploit qui mérite d’être mentionné. Qui plus est, il est la première personnalité politique à recevoir ce mandat sans n’avoir été auparavant ni ministre ni député, (à l’exception de ces 5 derniers mois). Et comme si la fonction faisait l’homme, c’est un Benny Gantz à la fois percutant, et apaisant, rassembleur mais également clairvoyant qui a prononcé ce soir-là au président de l’Etat un discours de haute tenue comme seuls des hommes politiques chevronnés en sont capables…
Le magic touch de Nétanyaou s’est évaporé
Pour la seconde fois en quelques mois, le Premier ministre a échoué dans ses efforts en vue de former une coalition majoritaire. Sa tâche était certes périlleuse mais beaucoup dans l’opinion publique israélienne étaient persuadés qu’au dernier moment, Bibi allait sortir de son chapeau magique un « joker » qui lui aurait permis in extremis de continuer à gouverner. Mais cette fois, Mr Nétanyaou est apparu à bout de souffle politique et il n’a pas réussi à séduire le moindre partenaire outre ceux du fameux bloc des 55 de Droite-Orthodoxes qui ont décidé de lier leur sort à celui de celui que certains appellent déjà le Premier ministre sortant… A 70 ans, et après avoir passé près de 25 ans au sommet de la pyramide politique, il semble que les affaires judiciaires dont l’issue est encore incertaine aient tout de même impacté sa légendaire rage de vaincre. Une véritable menace sécuritaire Il ne s’agit pas d’une fausse alerte : les menaces que fait peser l’Iran sur Israël et sur la région, directement ou via ses bras avancés que sont le Hezbollah ou les gardiens de la Révolution sont très sérieuses. Preuve en est : même le chef d’état-major Aviv Kohavi qui veille soigneusement à ne pas s’immiscer dans le débat politique, l’a reconnu, et a parlé de situation régionale « tendue et fragile », sous-entendant clairement que l’absence de gouvernement effectif risquait d’avoir des répercussions sécuritaires sérieuses pour Israël. Et le fait que la première rencontre Nétanyaou-Gantz se soit tenue dimanche au siège de l’état-major confirme qu’il y a danger et qu’il serait préférable que ces deux là trouvent au plus vite un réel terrain d’entente.
Le spectre d’un troisième scrutin…
Le passage du mandat de Nétanyaou à Gantz a considérablement amplifié les appréhensions des Israéliens qui redoutent de plus en plus la tenue de nouvelles élections. Gantz le comprend. Nétanyaou le comprend. Et c’est uniquement ce spectre qui les pousse à se rencontrer dans l’espoir de sortir le pays de la crise. Pour tous, l’option de nouvelles élections est une catastrophe : pour les économistes qui évoquent une récession latente qui risque d’exploser si le pays ne se dote pas vite d’un gouvernement. Seul dans un cas de figure particulier de telles élections pourraient être un atout : dans l’hypothèse où le conseiller juridique du gouvernement Mendelblit décide de réduire les chefs d’accusation contre Mr Nétanyaou. Le Premier ministre deviendrait alors le « martyr » du Parquet israélien et ses supporters plus ou moins inconditionnels pourraient alors profiter de telles élections pour le plébisciter à nouveau. Mendelblit devrait prendre sa décision dans 2 ou 3 semaines…
Les cas de figures les plus probables
En cas de formation d’un gouvernement d’union nationale de rotation, Binyamin Nétanyaou continue de poser deux exigences : être le premier à gouverner, et conserver à ses côtés son solide bloc de Droite. A Bleu-Blanc on propose au Premier ministre un compromis : renoncer à l’une des deux conditions et former un gouvernement d’union soit en restant à la présidence du Conseil sans son bloc soit en arrivant avec son bloc mais en renonçant à gouverner. Et pour que cette proposition soit envisageable à Droite, les conseillers de Bleu-Blanc l’ont amélioré en proposant à Mr Nétanyaou un gouvernement d’union à deux temps : durant le premier, ce gouvernement serait composé de Bleu-Blanc, du Likoud et d’Israël Beiténou. Il voterait quelques lois que les ‘harédim ne pourraient tolérer et dans quelques mois, les partis orthodoxes rejoindraient ce gouvernement. A Shas, on étudie « positivement » cette proposition.
Daniel Haïk