Alors que les médias internationaux s’inquiètent de l’escalade militaire
en cours entre Israël et l’Iran, notamment sur le théâtre syrien, avec tous
ses risques possibles d’embrasement voire de guerre régionale, il est clair que la menace la plus prégnante pesant sur Israël est celle de l’arsenal des quelque 80 000 missiles en possession du régime des mollahs de Téhéran et des quelque 120 000 missiles et roquettes du Hezbollah sud-libanais, bras armé de l’Iran au nord d’Israël… « Si l’Iran est la cible d’une attaque, nous raserons Tel Aviv et Haïfa, a déclaré le général iranien Yahya Rahim Safavi. L’Iran et le Hezbollah sont assez puissants pour réagir d’une manière adéquate à l’agression sioniste. Le Hezbollah dispose d’au moins 100 000 missiles et roquettes qu’il peut parfaitement utiliser ».* « Il est peu probable que l’aviation iranienne se décide à nous attaquer en Israël même. Car ce sont leurs missiles qui représentent une menace beaucoup plus sérieuse pour nous », a déclaré Israël Baharav, un général de brigade (à la retraite) de l’armée de l’air israélienne. Une vaste panoplie de missiles iraniens … et aussi syriens ! En plus des différents types de missiles « classiques » de type Shihab (modèles 1, 2, 3 et 4 à courte, moyenne ou longue portées) d’inspiration nord-coréenne, les Iraniens ont développé toute une panoplie de missiles balistiques à moyenne et longue portées. L’un d’eux, le Khorramshahr développé à partir du missile nordcoréen Hwasong – a fait l’objet d’un tir d’essai réussi le 30 novembre dernier depuis un site du sud-est de l’Iran : il s’agit d’une fusée à plusieurs têtes d’une portée de 1 800-2 000 kms pouvant frapper partout au Moyen-Orient et certains pays d’Europe, et aussi capable de transporter plusieurs ogives conventionnelles ou nucléaires. En avril dernier, l’Iran a aussi fait défiler son nouveau missile de croisière « intelligent » Kamin- 2 guidé par infrarouge, volant à basse altitude et équipé d’un système de téléguidage ciblant les drones et les chasseurs ennemis. Autant de préparations intensives à une « guerre des missiles » sans cesse dénoncée par les pays occidentaux à l’ONU.
Contrairement à sa quasiabsence de riposte face aux quelque 200 attaques aériennes menées par Israël en Syrie lors des deux dernières années contre des cibles iraniennes et/ ou du Hezbollah, la Défense syrienne a commencé ces derniers mois à tirer – mais sans succès – des missiles d’interception
en direction des forces israéliennes, notamment lors du raid du 25
décembre dernier sur l’aéroport de Damas. Il faut dire que les Syriens,nouvellement équipés par les Russes du dispositif antimissiles S-300, disposent d’un arsenal très composite de fusées fait à la fois de vieux
et de récents missiles, dont voici quelques exemples : le système de missiles Buk (ou SA-17 Grizly), un dispositif mobile des années 1970 de fabrication russe d’une portée de 150 kms ; le S-200 (ou SA-Gammon) agissant contre des cibles à haute altitude et d’une portée pouvant atteindre 300 kms avec une charge explosive de 200 kgs ; déployé autour des grandes bases syriennes, c’est ce type de missile qui a été intercepté en mars 2017 dans la Vallée du Jourdain par un missile Hetz de Tsahal, mais qui fut tiré avec
succès en février 2018 contre un F-16 de Tsahal au-dessus d’Israël ; c’est aussi avec ce S-200 que les Syriens ont abattu par erreur en septembre dernier un Ilouchine russe au-dessus de Lattaquié ; le système anti-missile S-300 fourni par Moscou à Damas en octobre dernier : tracté sur des semi-remorques, il n’a pas encore été utilisé par la Défense syrienne… dont les techniciens étudient encore le maniement. Quant aux Russes, ils ont déployé pour la défense de leur grande base aéronavale de Tartous, deux systèmes ultra-perfectionnés d’anti-missiles S-400 avec de puissants radars couvrant toute la Syrie et le nord d’Israël… Quatre scénarios d’une guerre
majeure Un récent rapport du major général de Tsahal, Nadaf Ben Hor, et de l’expert militaire Michael Eisenstadt, membre de l’Institute for Near East Policy de Washington, indique que « les tensions croissantes sur la frontière nord d’Israël font craindre le déclenchement d’un conflit entre Israël et le Hezbollah, ou une guerre entre Israël et l’Iran en Syrie ». Des tensions dues
« d’abord aux efforts du Hezbollah et de la Syrie – avec l’aide de l’Iran – pour produire des missiles de haute précision au Liban et en Syrie, capables de paralyser les infrastructures vitales d’Israël et d’y rendre la vie insupportable ; et, ensuite aux tentatives de l’Iran de faire de la Syrie une tête de pont des opérations militaires contre Israël et une plate-forme d’expansion de sa puissance au Levant ». Ce rapport a également prévu la possibilité d’une guerre au Moyen-Orient pouvant éclater en 2019 selon 4 scénarios, le 1er étant une guerre Israël-Hezbollah au Liban impliquant des Iraniens et des miliciens chiites étrangers. Le 2e scénario est une guerre Iran-Israël en territoire syrien impliquant des milices pro-Téhéran et des éléments de l’armée syrienne. Le 3e est une guerre Iran-Israël au Liban et en Syrie. Le 4e prévoit l’extension d’une guerre régionale impliquant l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. « En réaction aux ripostes israéliennes, dit ce rapport, l’Iran pourrait lancer des attaques aux missiles,
des opérations subversives ou des cyberattaques contre des installations pétrolières arabes dans tout le golfe Persique. Ce qui pourrait entraîner une escalade voire même une intervention militaire des USA ». Dans cette éventualité de confrontation militaire Iran-Israël, le rôle principal reviendra sans doute à la qualité des armements et du matériel de guerre, soulignent des spécialistes de la CIA unanimes à reconnaître que dans ce domaine, Israël a une supériorité absolue, notamment face au parc d’avions tout à fait obsolète de l’armée de l’air iranienne. Mais si la puissance militaire israélienne dépasse celle de l’Iran pour bien des paramètres, il faut tenir compte d’autres facteurs, dont le volume de la population des pays concernés. Ainsi, le classement 2018 des forces militaires de plus de 100 pays du monde établi par le groupe Global Firepower place Israël et l’Arabie Saoudite… derrière l’Iran, qui a grimpé ces dernières années de 7 rangs en passant de la 27e place en 2010 à la 20e… Richard Darmon