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3 Tishri 5785‎ | 5 octobre 2024

Comment Bibi l’orfèvre politique a réussi à sauver sa coalition étriquée

Israeli prime minister Benjamin Netanyahu leads a faction meeting in the Israeli parliament on November 19, 2018. Photo by Miriam Alster/FLASH90 *** Local Caption *** øàù äîîùìä áðéîéï ðúðéäå áéáé ìéëåã ëðñú

La crise politique provoquée par la démission d’Avigdor Lieberman a bien failli faire « plonger » le Premier ministre israélien. Mais au dernier moment, Mr Nétanyaou a réussi grâce à une habile manoeuvre à retourner une situation périlleuse à son avantage. Explications et analyse.

Cela faisait bien longtemps que l’on n’avait pas associé le titre de magicien au Premier ministre Binyamin Nétanyaou… jusqu’à ce lundi, en milieu de journée, lorsqu’il s’est avéré que Naftali Benett et Ayelet Shaked avaient renoncé à démissionner et donc que le spectre d’élections anticipées se soit éloigné de l’échiquier politique israélien… Binyamin Nétanyaou ne voulait pas de telles élections. Pas maintenant. Pas comme cela. Et finalement, comme souvent, il a obtenu gain de cause ! Une fois de plus, Bibi a réussi à sortir gagnant  d’une situation qui paraissait terriblement compromise de son point de vue. Et il l’a fait avec un tel brio, qu’il a laissé bouche bée ses supporters et ses adversaires, prouvant qu’il n’est jamais aussi efficace que lorsqu’il est affaibli, blessé, et touché. Affaibli, Binyamin Nétanyaou l’a été incontestablement après la réunion du cabinet restreint pour la sécurité nationale du mardi 13 novembre, réunion au cours de laquelle il a accepté le cessez-le-feu proposé par les Egyptiens (voir notre analyse pages 10-12). Affaibli, il l’a été aussi par la décision d’Avigdor Lieberman de démissionner et de quitter le ministère de la Défense en pleine crise sécuritaire. Affaibli, il l’a été enfin par les sondages qui ont fait état d’une baisse sensible du Likoud et d’un dangereux rétrécissement du bloc de Droite. Blessé, il l’a été par les manifestations de protestation des habitants de  Sdérot qui l’ont accusé de compromission avec le Hamas et par les 74 % d’Israéliens qui ont critiqué sa politique « pacifiste » ou    « gauchisante ». Touché, il l’a été aussi par l’annonce de l’ultimatum jeudi lancé par Naftali Benett qui lui a réclamé le portefeuille de la Défense laissé vacant par Lieberman. Vendredi, alors que le ministre
des Finances Moché Kahlon (Koulanou) et le ministre de l’Intérieur Arie Derhy (Chass) appelaient à la tenue d’élections anticipées, le Premier ministre paraissait avoir touché le fond. Mais c’est alors que tout paraissait perdu, et que les observateurs pariaient déjà sur des élections le 26 mars prochain, que Nétanyaou a fait ce qu’il sait faire de mieux : manoeuvrer habilement en situation périlleuse et redresser la barre à son avantage. Première étape de cette manoeuvre : persuader Moché Kahlon de renoncer à des
élections anticipées. Comment ? En faisant valider par le gouvernement, dimanche dernier, en pleine crise, un très vaste projet visant à réajuster les salaires et les retraites des policiers israéliens à ceux des officiers de Tsahal. Coût de ce projet très cher au coeur du ministre des Finances : 22 milliards de shekels sur 17 ans, jusqu’en 2035 !! Un projet qui a contraint les ministres à renoncer à 1,3 % de leur budget annuel durant ces 17 années ! Quel cadeau du Premier ministre au patron de Koulanou ! Et l’effet ne s’est pas fait attendre.  Soudain Moché Kahlon a tu son opposition au maintien de la coalition. Première mission accomplie.  La seconde étape de la manoeuvre politique de Nétanyaou était plus ardue puisqu’elle consistait à neutraliser l’enfant terrible du gouvernement, Naftali Benett. Pour cela le Premier ministre a sorti les grands moyens : dimanche soir, dans un discours à la Nation, il a annoncé qu’il reprenait le portefeuille de la Défense : « En tant que ministre des Finances, j’ai restauré l’économie
israélienne qui était au bord du gouffre. En tant que ministre des Affaires Etrangères j’ai sorti Israël de l’isolement diplomatique et j’en ai fait une nation courtisée par les plus grands pays. Je saurai en tant que ministre de la Défense garantir au mieux la sécurité d’Israël » a déclaré le Premier ministre qui après avoir été pendant de longues années Mr Sécurité devenait pour la première fois, à l’instar d’illustre
prédécesseurs comme Ben Gourion, Levy Eshkol, et Rabin, ministre de la Défense nationale.
En agissant de la sorte, Mr Nétanyaou n’a pas seulement infligé un camouflet retentissant à Naftali Benett, il lui a  surtout tendu un piège : de facto Naftali Benett qui jusqu’à cet instant paraissait vouloir faire fléchir le Premier ministre, s’est brusquement retrouvé le dos au mur et confronté à un terrible dilemme : soit il ravalait son orgueil et reconnaissait le leadership sécuritaire du Premier ministre, soit il allait jusqu’au bout de son ultimatum et démissionnait quitte à être tenu pour responsable direct de la
chute du gouvernement. Dans les deux cas il sortait perdant. Benett réagit à  la démarche de Nétanyaou en convoquant une conférence de presse avec la  ferme intention de démissionner et donc de plonger le pays dans une campagne électorale prématurée. Mais la nuit a porté conseil et elle a surtout confronté Benett aux critiques de certains dirigeants du Foyer Juif et de nombreux rabbanim. Au bout du compte, et après un suspens à couper au couteau, Benett et Shaked ont cédé et ont renoncé à démissionner : comme Nétanyaou la veille, ils ont insisté sur la nécessité de faire montre de responsabilité et ont expliqué que l’intérêt de la Nation passait avant leur intérêt politique. Et pour se sortir de cette mauvaise passe dans laquelle Nétanyaou les a projetés, ils ont émis l’espoir que « le Premier ministre saura rectifier la trajectoire actuelle de la Défense Nationale et donnera à l’armée la possibilité de vaincre sur le terrain ». Au soir de cette journée mouvementée, le Premier ministre, tout sourire, pouvait savourer sa victoire : il avait réussi une fois de plus là où tout le monde le voyait échouer et venait de préserver au moins pour quelques semaines ou mois, sa fragile coalition.
Daniel Haïk

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