Je l’ai connu. C’était un homme spécialement joyeux, qui souriait souvent et riait sans fin. Il avait une joie intérieure et une sérénité qui rejaillissaient sur tous ceux qui le rencontraient. Tous ceux qui le connaissaient recherchaient sa compagnie, absorbaient ses sentiments et leur humeur se transformait tout de suite. Si une personne déprimée le rencontrait, elle changeait et devenait contente et souriante. Jusqu’à ce que…
Mais juste avant, j’ai essayé d’enquêter sur la source de sa joie et de sa sérénité. J’ai fait la liste des choses qu’il avait et de celles qu’il n’avait pas… Avant tout, il avait toute confiance en son entourage. Il savait qu’il pouvait compter à 100 % sur les gens autour de lui. C’est sans doute une bonne raison d’être joyeux et serein !
D’autre part, j’ai vérifié ses biens pour voir si c’était la richesse qui lui donnait sa joie. Mais non ! Il n’avait pas de biens, pas même un compte en banque. Il avait quelques objets personnels auxquels il ne prêtait guère attention. L’absence d’inquiétude quant aux biens apporte peut-être le calme et la sérénité, me suis-je dit. Mais d’autre part, l’absence d’assurance pour son avenir financier crée chez chacun une inquiétude qui doit certainement affecter la joie. Peut-être la grande confiance qu’il avait envers son entourage lui avait réglé ce problème… L’une des choses étonnantes, c’était sa capacité motrice qui était, pour le moins, très mauvaise. Il était la majeure partie du temps assis sur une chaise roulante. Malgré son handicap physique, il restait joyeux. Un autre trait de caractère qui intervenait beaucoup dans sa joie, c’était son absence de jalousie. Il était heureux et aimait ce qu’il avait, sans s’intéresser à ce qu’avaient les autres. Il ne fait pas de doute que c’était directement lié à la joie qui émanait de lui…
Une autre chose très importante, c’est que sa conscience ne l’importunait pas, car il ne savait pas ce que voulait dire « mal agir ». Jusqu’à… Ce qu’il ait eu un an. A ce moment-là, il a commencé à vouloir ce que les autres avaient, à être jaloux. Plus il grandissait et voulait davantage, plus il perdait sa confiance en la capacité de son entourage de lui fournir ce qu’il désirait. C’est ainsi qu’il a perdu sa joie, sa sérénité et son influence sur les autres. Une grande partie des lecteurs, qui ont connu le Roch Yechiva Rav Aharon Leib Steinman zatsal, pensaient probablement que j’écrivais à son sujet, jusqu’à la description de la chaise roulante… Le Roch Yechiva avait une joie intérieure pour les mêmes raisons que tous les bébés en ont. Il ne l’avait pas gâchée, tout simplement, ou plus exactement, il l’avait rectifiée et construite au cours de sa vie. « D.ieu a fait l’homme droit, mais eux ont cherché de nombreux calculs » (Kohélet 7.29). *** Lors de Souccot, nous avons la mitsva d’être joyeux, davantage encore que lors des autres fêtes, bien davantage. Car nous venons de terminer de couronner D.ieu comme Roi sur nous, nous L’avons accepté de tout cœur. Il octroie la bénédiction, la paix et une bonne parnassa à chaque être vivant, sans jalousie ni concurrence. Ensuite, nous nous sommes purifiés devant Lui et immergés spirituellement dans le Jour d’Expiation. Nous avons crié : « Je suis comme l’argile dans la main du potier, comme une feuille envolée par les méfaits du penchant ». Nous avons recherché Sa proximité du plus profond de nous-même, nous avons promis de ne « plus revenir à nos méfaits passés » et nous avons quitté Yom Kippour tout propres.
Tout est parfait : nous sommes à nouveau liés à Lui, comme un enfant qui vient de naître. Nous sommes joyeux sous les ailes de Sa soucca, entourés des ailes de Sa Chekhina, des nuées de Gloire. Nous avons lu dans Kohélet que « D.ieu a fait l’homme droit » et l’importance de la joie authentique dans laquelle Kohélet voit la façon de trouver « un avantage dans ce monde ». A Chemini Atséret, nous avons senti Son désir que nous nous arrêtions et restions un jour de plus dans la même situation, avec ce même lien pur. C’était une allusion évidente à Son désir de garder ce lien qui venait de se rétablir entre nous. A présent, « nous commençons depuis le commencement ». D.ieu est prêt à rester avec nous tant que nous réussissons à conserver le lien unique, spécial, qui s’est forgé entre nous « lorsqu’Il était proche ». Grâce à lui, la joie et la sérénité nous accompagneront au cours de l’année, pendant les jours ordinaires. Je souhaite à tous un bon hiver, casher et joyeux !
RAV ELIAV MILLER, MANCAL LEV CHOMEA