Le nouveau centre européen du judaïsme inauguré le 29 octobre par le président Emmanuel Macron aspire à être désormais le cœur battant d’une communauté juive parisienne et française qui en dépit des attentats, de la résurgence de l’antisémitisme, et de l’affaiblissement démographique, reste particulièrement vivace et dynamique. Le maître d’œuvre de ce Centre, qui n’est autre que le président du Consistoire Joël Mergui a guidé Haguesher dans ses somptueux espaces. Une visite qui vaut le déplacement !
A l’origine du Centre Européen du Judaïsme, il y avait le très regretté grand rabbin de France rav Yossef Haïm Sitruk zatsal. C’est en effet lui qui avait obtenu du maire de Paris de l’époque le terrain sur lequel de nombreuses années plus tard sera érigé le Centre. Longtemps le projet a été gelé. Jusqu’à ce que Joël Mergui, d’abord président du Consistoire de Paris puis également président du Consistoire Central, s’empare de ce rêve et le transforme peu à peu, au fil des ans, envers et contre tout, mais avec les pouvoirs publics français, en cette somptueuse réalité que l’on peut admirer désormais au cœur du 17e arrondissement de Paris. Dans sa vision du futur de la Communauté juive, Joël Mergui était persuadé qu’il était indispensable de doter l’Ouest parisien d’un point d’ancrage communautaire d’envergure, à la mesure des mutations démographiques qui avaient conduit des milliers de Juifs à venir s’installer dans les 16 et 17e arrondissements de Paris. Mais avant de voir le jour, le projet du Centre Européen du Judaïsme a dû se heurter aux douloureux écueils du terrorisme qui a frappé la France en général et la communauté juive en particulier. Lorsqu’on lui parle de la création du C.E.J, Joël Mergui n’oublie pas qu’il a obtenu le permis de construire de Bertrand Delanoë, alors maire de Paris, le 16 mars 2012 soit trois jours à peine avant le massacre de l’Ecole d’Ozar Hatorah à Toulouse. Quant à la grande soirée des Donateurs qui a suivi la pose de la première pierre du Centre, elle s’est déroulée dans la grande salle des fêtes de l’Hôtel de Ville de Paris, le 29 juin 2015, donc au cœur de cette année d’horreur qui avait débuté par les attentats meurtriers de Charlie et de l’Hypercasher avant de se conclure sur le massacre du Bataclan. Mais si ces dramatiques obstacles, accompagnés du départ massif de près de 20 000 Juifs français en Israël entre 2014 et 2018, ont certes ébranlé les dirigeants du Consistoire, ils ne les ont pas brisés. Loin de là. Avec une détermination à toute épreuve et un sens des responsabilités aigu, Joël Mergui n’a cessé de croire à la réalisation de ce défi qu’il s’est lancé avec son équipe. Aujourd’hui en dépit des vicissitudes, en dépit des critiques de ceux qui ne voyaient pas l’intérêt de fonder un tel Centre dans une conjoncture aussi difficile, Joël Mergui peut être satisfait : il a remporté son incroyable pari et dote la Communauté juive de Paris, première communauté juive d’Europe, d’un Centre de dimension européenne qui confirme la vitalité d’un judaïsme français que l’on disait injustement souffrant ou affaibli. A l’occasion de l’inauguration solennelle du Centre par le président de la République Emmanuel Macron, ce mardi 29 octobre, Joël Mergui nous a ouvert les portes de ce splendide bâtiment qui trône désormais dans le 17e arrondissement, au cœur de régions plébiscitées par la communauté juive et à une adresse très hautement symbolique puisqu’il s’agit de la place de Jérusalem, inaugurée il y a quelques mois en présence d’Anne Hidalgo, maire de Paris et de Moché Léone, maire de la capitale israélienne.
Imaginé par les architectes Bruno Fléchet et Stéphane Maupin, le Centre Européen du Judaïsme qui semble avoir été placé sur le symbole du chiffre 3 vaut bien plus qu’un coup d’œil. Jugez plutôt ! Le C.E.J aura en effet une triple vocation essentielle: Défendre le judaïsme français et européen et son patrimoine ; lutter contre toutes les formes d’antisémitisme et sauvegarder la tradition juive. Au-delà, il pourra mutualiser les ressources, moderniser les structures et les modes de fonctionnement, développer l’identité juive sous toutes ses facettes, resserrer les liens de solidarité et d’échange et mettre à disposition du public une offre diversifiée de services afin de faire du C.E.J une véritable Maison des communautés juives de France qui concrétisera la foi en l’avenir du Consistoire, et ce en partenariat avec les institutions juives et les pouvoirs publics.
Sur un terrain de 1650 m, attribué par la mairie de Paris, le C.E.J a relevé un défi architectural à la mesure de ces trois enjeux en les matérialisant, sur un socle commun, en trois pôles distincts : une splendide synagogue qui sera la plus spacieuse de tout l’Ouest parisien (!) et deux bâtiments d’activités culturelles et institutionnelles. La synagogue qui est désormais la plus importante de l’Ouest parisien et qui porte le nom du regretté Edmond J. Safra, a déjà accueilli dans ses murs plus de 500 fidèles durant les fêtes de Tichri. Quant au bâtiment qui abrite le pôle culturel, il porte le nom de Patrick et Lina Drahi. Exemplaire en termes de sécurité et de qualité environnementale, économe en énergie, d’une surface totale de 4950 m2, accessible aux personnes à mobilité réduite, le Centre offre de vastes espaces modulables pour satisfaire une demande d’équipements adaptés à tous les besoins. Le socle comprend un vaste hall d’accueil et d’exposition ainsi qu’un café et un restaurant ouverts aux visiteurs. Non loin du mikvé, un jardin et des terrasses plantées sur toiture sont à la disposition du public, comme espaces de détente ou d’activités culturelles et cultuelles. L’abstraction des volumes de la synagogue et des deux bâtiments de 5 et 8 étages, ainsi que l’insertion urbaine de la construction en béton, maille métallique et verre, signent le caractère original et contemporain de ce centre entièrement consacré au judaïsme français et européen et à l’épanouissement de ses communautés. Le coût total du Centre se situe autour des 15 millions d’euros et il est financé par les pouvoirs publics (3M), par plusieurs grandes Fondations telles que les Fondations Edmond J. Safra, Patrick et Lina Drahi, de Rothschild et la FMS (5M) ; par des donateurs du Consistoire (3M) et enfin par des crédits (4M).
DANIEL HAÏK