Tout d’abord, chapeau ! Chapeau bas au Mossad et aux Renseignements militaires qui ont confirmé leurs talents en dérobant en plein cœur de Téhéran, l’ensemble des archives nucléaires iraniennes. La révélation, lundi soir, par le Premier ministre israélien de l’existence de ces dizaines de milliers de documents a provoqué une telle stupéfaction au sein de la communauté internationale que le cours du pétrole a brusquement grimpé en quelques minutes ! C’est une immense fierté pour l’Etat hébreu que de disposer de services aussi performants. Mais du point de vue du Premier ministre, ce n’est pas le plus important. Car pour Mr Nétanyaou, ces précieux documents ne sont qu’un levier, certes d’importance, mais indispensable pour atteindre deux objectifs complémentaires : le premier est d’ouvrir la voie à Donald Trump, afin que celui-ci dispose de toute la légitimité nécessaire pour « déchirer » le 12 mai prochain ce « mauvais accord de Vienne » de juillet 2015. D’ailleurs le président américain ne s’y est pas trompé. Après avoir suivi en direct (!) la conférence de presse du Premier ministre israélien, il a déclaré : « La présentation de Mr Nétanyaou prouve que j’avais raison à 100 %. Cet accord de Vienne est terrible pour les Etats-Unis ». Au passage on remarquera l’étroite coordination entre les deux leaders…
Le second objectif, plus âpre à atteindre, sera de persuader les pays européens signataires de l’accord qu’ils se sont fait duper par les Iraniens, depuis les trois dernières années. Des officiers des services de Renseignements militaires devraient présenter, sous peu, aux Européens les preuves flagrantes de la poursuite par les Iraniens de leur programme nucléaire et militaire. Mais il n’est pas certain que cela suffise à persuader le trio des trois M, (Macron,Merkel et May) d’accepter une révision totale de l’accord.
Par contre, ces impressionnantes révélations devraient avoir un impact sur le régime des Mollahs. La réaction ironique et sarcastique de Djawad Zarif, le chef de la diplomatie iranienne masque une profonde gêne. Désormais, les Iraniens auront plus de mal à exiger des Européens qu’ils respectent les termes de l’accord s’il est prouvé qu’eux-mêmes les violent allègrement…
Mais au-delà, les révélations faites lundi soir par Binyamin Nétanyaou, sont avant tout un acte d’accusation public lancé par le Premier ministre contre ceux qui, au cours des 15 dernières années, ne l’ont pas pris au sérieux lorsqu’il mettait en garde face à la menace du nucléaire iranien. C’est un acte d’accusation face à l’hypocrisie des nations qui se sont menti à elles-mêmes en laissant croire, ou en faisant semblant de croire que l’Iran, Etat terroriste par excellence, serait capable de respecter les termes d’un accord international. C’est un réquisitoire contre ceux des Israéliens, politiques ou militaires, qui lui ont reproché d’être un va-t-en guerre.
Pour Mr Nétanyaou, cette démonstration de lundi soir avait effectivement des airs de revanche.
A ceux qui ont affirmé que le Premier ministre aurait provoqué un impact plus fort au sein de la communauté internationale s’il avait brandi parmi les dizaines de milliers de documents, la preuve accablante irréfutable, les experts répondent qu’il ne pouvait mettre un document spécifique en évidence parce que ce sont ces milliers de documents tous ensemble qui permettent de prouver que jamais les Iraniens n’ont réellement renoncé à leur projet nucléaire.
200 missiles iraniens détruits sur le sol syrien
Le raid contre deux bases militaires iraniennes près de Hama, en Syrie, raid qui s’est soldé par la destruction massive de quelque 200 missiles iraniens sophistiqués, quelques heures après le passage-éclair en Israël du nouveau secrétaire d’Etat américain Mike Pompéo, et quelques heures avant les révélations sensationnelles de Nétanyaou, est un événement sans précédent : il est vrai qu’il y a quelques semaines des appareils ont frappé la base T4 mais l’ampleur de la destruction dans le double raid de dimanche soir est sans commune mesure avec ce précédent raid. Les témoins ont affirmé que la terre avait tremblé durant l’explosion de ces missiles. Sans parler des 26 victimes, pour la plupart de nationalité iranienne. Officiellement Israël ne revendique pas la paternité de cette attaque. Mais comme pour la T4, il ne faut pas se faire d’illusion : l’empreinte laissée par les frappes aériennes ressemble singulièrement à celle de l’armée de l’Air israélienne. Outre l’amplitude de cette attaque, l’autre différence majeure, c’est le mutisme des Iraniens, des Syriens mais aussi des Russes. Alors que ces derniers avaient formellement accusé Tsahal d’avoir attaqué la T4, Poutine s’est tu cette fois. Peut-être est-ce dû à la conversation téléphonique qu’il a eu quelques heures plus tard avec Binyamin Nétanyaou, et durant laquelle il est probable qu’il ait reçu un rapport concis sur les documents iraniens récupérés par le Mossad. Même les Iraniens sont restés bouche bée et ils ont tout fait pour minimiser le volume des dégâts. Téhéran semble avoir compris, au cours de cette douloureuse journée du 30 avril, que les Israéliens étaient devenus leur « Big Brothers » et qu’ils savaient quasiment tout d’eux : du déplacement des missiles destinés aux Hezbollah, jusqu’aux plus infimes détails de leur programme nucléaire. Les Iraniens ont compris qu’une attaque ouverte et directe contre Israël risquait de mettre en péril leur régime… Et ils ont pris peur. Daniel Haïk
Comment les Israéliens ont mis la main sur les archives nucléaires iraniennes…
Selon les informations qui ont été autorisées à la publication, le Mossad israélien a découvert dès février 2016, le transfert de documents du programme Amhed (nom de code du projet militaire et nucléaire iranien) vers le centre de Téhéran, dans une maison privée anodine. A partir de là, les agents secrets israéliens ont repéré le lieu où les documents avaient été rassemblés et l’ont espionné à la loupe. Il y a quelques semaines à peine, grâce à des contacts à travers le monde, à des moyens technologiques très sophistiqués et à des ressources financières non négligeables, le Mossad a réussi à rassembler des milliers de documents qui se trouvaient dans cette maison et qui se rapportaient à la poursuite du programme nucléaire iranien. Après avoir pris conscience du « trésor » dont il disposait, le patron du Mossad Yossi Cohen s’est rendu à Washington, où il a rencontré le président Trump, le patron de la CIA son ami Mike Pompéo (devenu la semaine dernière Secrétaire d’Etat) et il leur a présenté les documents prouvant la poursuite du programme nucléaire iranien. Parallèlement il a été décidé, après de sérieuses discussions, de révéler l’existence de ces documents et le Mossad a estimé que cela n’affectera aucunement ses sources d’informations à l’étranger. D.H.