Des prisonniers radicalisés ont blessé cinq surveillants. Le personnel pénitentiaire est en ébullition car la gestion des djihadistes et de leurs soutiens incarcérés est devenue impossible. Le gouvernement a annoncé des mesures de saupoudrage.
Prosélytisme, violence, préparation d’attentats… : alors qu’ils représentent une partie infime des détenus (2,3%), les islamistes radicaux, comme celui qui a blessé, le 11 janvier, trois surveillants de la maison centrale de Vendin-le-Vieil, bouleversent l’écosystème carcéral. Les gardiens de cette prison du Pas-de-Calais se sont mis en grève et la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a visité les lieux dans un climat explosif.
Puis, des débrayages ont été enregistrés un peu partout sur le territoire.
Quelques jours plus tard, le 19, deux employés de la maison d’arrêt de Borgo (Haute-Corse) ont été atteints à la gorge et au thorax par un autre islamiste qui a crié « Allah ouAkbar » en assenant ses coups. Les victimes ont été hospitalisées et Nicole Belloubet s’est déplacée à nouveau… sous les huées.
Les mille trois cents individus radicalisés et cinq cents coupables ou complices d’actes de terrorisme incarcérés en France posent des défis insurmontables à l’administration pénitentiaire.
« A la différence des militants indépendantistes corses ou basques, qui ne se regroupaient qu’entre eux, les islamistes ont vocation à convertir à leur cause les condamnés de droit commun. Dès lors, circonscrire leur influence est extrêmement difficile », a remarqué devant la presse la sociologue Ouisa Kies.
D’autre part, aucun accommodement n’est possible avec le personnel des prisons, perçu comme ennemi irréductible.
En juin 2016, après avoir abattu à leur domicile de Magnanville (Yvelines) le policier Jean-Baptiste Salvaing et sa compagne Jessica Schneider, le djihadiste Larossi Abballa a prôné l’assassinat de gardiens depuis sa cellule, au cours d’une litanie revendicative diffusée sur Internet.
Deux mois plus tard, le 10 août, une liste de cibles a été publiée. Les employés pénitentiaires y figuraient au premier chef, mais aussi quelques personnalités – journalistes, chercheurs, dirigeants politiques – citées nommément. A l’époque, les services de renseignement ont attribué la paternité de la liste à Rachid Kassim, un combattant dans les rangs de Daesh et propagandiste notoire originaire de Roanne (Loire), abattu depuis en Irak.
Le 4 septembre 2016, le terroriste Bilal Taghi a planté dans le cou d’un de ses surveillants de la prison d’Osny (Val-d’Oise), un poinçon métallique confectionné en érodant un barreau de sa cellule. Il est devenu un héros pour les islamistes français et le symbole du jusqu’au-boutisme véhiculé par des centaines de détenus prêts à profiter de la moindre opportunité pour frapper.
C’est pourquoi l’exécutif a réduit le nombre de quartiers séparés réservés à cette population carcérale. Car ils limitent le prosélytisme et les endoctrinements mais sont également propices à la préparation d’attaques à l’intérieur ou à l’extérieur des lieux d’enfermement. Comment faire face au dilemme ? Le gouvernement, à ce stade, n’a rien proposé de tangible, sinon quelques embauches et une sécurité accrue autour des djihadistes les plus dangereux. Des mesures largement insuffisantes pour le syndicat Force ouvrière (FO).
Axel Gantz