Au lendemain de la très nette victoire des candidats de sa liste, le président du Consistoire a souhaité réagir.
Haguesher : Quelle analyse faites-vous des résultats des élections de dimanche ?
Joël Mergui : Ne faisons pas l’erreur d’utiliser l’habituelle grille de lecture chiffrée et de sous-estimer le choix historique qui vient de se produire dimanche. Je suis très reconnaissant envers les électeurs qui ont opéré un choix qui illustre combien la communauté est en mouvement et en pleine mutation.
Ils ont reconnu le travail qui a été fait ces dernières années. Ils n’ont pas voulu sanctionner une équipe qui a travaillé, qui s’est battue pour bousculer les pesanteurs et remettre en mouvement un Consistoire sur lequel pèsent encore des inerties anciennes et le poids des habitudes héritées d’un temps où la crise démographique et économique épargnait notre communauté.
Les changements que nous avions engagés avec l’équipe d’administrateurs élus en 2013 ne devaient manquer ni de temps ni de soutien pour être amplifiés et conduire à innover davantage. Les électeurs l’ont compris en votant pour un renouveau étroitement accompagné de l’expérience de Jack-Yves Bohbot et de David Amar notamment qui ont porté mon bilan et conduit avec brio le regroupement « Osons le Judaïsme ! ».
Le faible nombre de candidats traduit la même chose. L’Alya nous a certes privés de candidats et de votants potentiels très engagés, mais la faible mobilisation des candidats témoigne surtout d’une absence de projets neufs et fondamentalement différents du nôtre. C’est à mon avis une validation implicite du travail effectué et de ses acteurs : il n’y pas eu de vote sanction, mais une approbation tacite ! Les électeurs et les candidats ont fait le choix d’un Consistoire uni et fort, qui ne se disperse pas en vaines querelles ni en divisions et ça, c’est une preuve de maturité exemplaire surtout en des temps si difficile !
L’autre conclusion si évidente qu’elle pourrait ne pas être analysée à sa juste valeur, c’est la véritable révolution silencieuse qui vient de s’opérer sous nos yeux. Imaginez que c’est au sein de l’unique institution religieuse juive française, celle que d’aucuns critiquent à l’envi en la faisant injustement passer pour rétrograde, péjorativement ancestrale, démodée et d’arrière-garde, que les électeurs ont porté au total 10 femmes aux plus hauts postes de direction du Consistoire de Paris ! L’ACIP rassemble tout de même plus de 60 % de la communauté juive française, c’est la première communauté juive d’Europe. Non seulement nous n’avons pas eu peur de présenter de jeunes femmes avec la bénédiction des autorités religieuses – pour qui seules comptent les compétences, la qualité de l’engagement et la fidélité aux valeurs du judaïsme – mais les électeurs ont largement suivi et choisi de leur faire également confiance pour poursuivre la tâche que je me suis fixée, à savoir : faire du Consistoire un rempart de nos libertés, une maison accueillante pour tous les juifs, le lieu où puiser force, enthousiasme mais aussi les moyens de vivre une vie juive épanouie grâce à une offre de services de qualité en nous appuyant sur le Centre européen du Judaïsme. Le message est clair : la modernité n’est pas toujours là où on veut bien faire semblant de le croire ! Quelle institution est désormais aussi exemplaire ?