On se souvient qu’en 2015, lors de la campagne électorale du parti Bayit Yéhoudi, son N°1 Naftali Bennett avait déjà avancé l’idée d’une annexion de la « Zone C » créée en Judée-Samarie par les Accords d’Oslo de 1993 et 1995 – qui représente environ 60 % de la surface de cette double région où Israël continue d’exercer un plein contrôle sécuritaire et civil, et où sont concentrées la plupart des localités juives se trouvant au-delà de la Ligne verte d’avant juin 1967. Malgré la forte opposition de la communauté internationale à un tel projet, Bennett avait expliqué alors qu’en l’absence d’un partenaire palestinien sérieux et fiable pour tenter d’appliquer la fameuse « solution à deux États » préconisée par les USA, l’Europe et l’ONU, Israël se devait de prendre l’initiative en rattachant à son territoire d’avant juin 1967 les « blocs d’implantations » (définis par l’ex-Premier ministre Ariel Sharon dans une lettre officielle acceptée en 2003 par l’ex-président américain G. W Bush) de Maalé Adoumim , Ariel et du Gouch Etsion.
En fait, jusqu’il y a quelques mois, seuls Bayit Hayéoudi et quelques groupes de la droite nationaliste israélienne soutenaient ce projet.
Or, trois facteurs ont remis à l’ordre du jour les débats sur ce dossier, y compris au sein des grands partis de droite de la coalition comme le Likoud, Israël Béteinou et certains partis religieux :
-1/ les violences continues de « l’Intifada des poignards » démarrée au début octobre 2015 et qui se sont poursuivies pendant presque un an, faisant plus d’une quarantaine de morts et des centaines de blessés israéliens : preuve pour la droite que les Palestiniens ne souhaitent pas parvenir à une solution de paix négociée avec Israël ;
-2/ l’abandon définitif par Obama et Kerry, avec le vote de la résolution 2334, des paramètres axiaux de la fameuse Résolution 242 de décembre 1967 demandant à Israël de se retirer « de [certains] territoires » passés sous son contrôle pendant la Guerre des Six-Jours : une formulation qui laissait assez de marge de manœuvre pour une solution négociée. Ce qu’exclut totalement, désormais, le texte de la Résolution 2334 puisqu’il qualifie toutes les localités juives, et par extension la présence juive en Judée-Samarie et dans les quartiers-Est de Jérusalem, d’« illégales » ;
-3/ l’entrée en fonction le 20 janvier prochain du président américain élu, Donald Trump, qui a déclaré la semaine dernière après le « coup de Jarnac » d’Obama à l’ONU: « Nous ne pouvons pas continuer à laisser Israël être traité avec un total mépris et un tel manque de respect ! Les Israéliens avaient l’habitude de voir dans notre pays un grand ami, mais ce n’est plus le cas. Le début de la fin a été cet horrible accord nucléaire avec l’Iran, et maintenant l’ONU… Reste fort Israël, car le 20 janvier est très proche ! »
Dans une déclaration solennelle prononcée le 25 décembre dernier devant le Mur occidental, Bennet a demandé l’annexion d’une partie de la Judée-Samarie, en promettant de faire avancer un premier projet de loi, ce mois-ci à la Knesset, qui étendrait la souveraineté israélienne sur la grande localité de Maalé Adoumim (40 000 habitants) située au nord est de la capitale.
Un projet qui serait soutenu par la coalition parlementaire actuelle, car, selon Bennet, le gouvernement Nétanyaou attendrait l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, le 20 janvier prochain, pour présenter de nouveaux projets de loi remaniant la carte du pays. « Avec l’arrivée du président Trump à la Maison-Blanche, a-t-il précisé, toute l’arène politique israélienne se préoccupera dès la fin janvier de la nécessaire annexion de Maalé Adoumim ».
Repris ensuite par la ministre de la Justice, Ayélèt Shaked, Bennett a aussi suggéré le 29 décembre qu’Israël devrait agir « comme l’avait fait l’ex-Premier ministre Begin concernant le plateau de Golan en 1981 ». Et de préciser : « Il ne s’agit pas de l’annexion de toute la Judée-Samarie, mais d’annexer les zones où vivent les Israéliens, tout en accordant une autonomie dans les secteurs où vivent les Palestiniens ».Richard Darmon